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Suivi d'un patient insuffisant cardiaque

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Suivi d'un patient insuffisant cardiaque

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Timing des consultations de suivi pour un patient insuffisant cardiaque: en pratique.

Peu de temps après la sortie d'hospitalisation pour décompensation cardiaque, de nombreux problèmes peuvent encore se produire. La réduction des durées de séjour raccourcit le temps d'observation de la tolérance du traitement prescrit. Par ailleurs, le traitement de l'insuffisance cardiaque est souvent partiel lors de la sortie d’hospitalisation et une titration de ce traitement doit être rapidement effectuée au cours des premières semaines suivant l'admission.

Ces patients doivent donc être étroitement surveillés peu de temps après leur sortie d’hospitalisation avec des contrôles cliniques réguliers jusqu'à ce que leur état se stabilise et que le traitement de l'insuffisance cardiaque soit optimisé au maximum le plus rapidement possible (au maximum dans les 3 à 6 mois suivant le diagnostic).

Lors de sa sortie d'hospitalisation, le patient doit recevoir des informations concrètes pour son suivi ultérieur.

Les lignes directrices de l'ESC recommandent depuis longtemps une consultation rapprochée de suivi (1 à 2 semaines après la sortie de l'hôpital). Une réévaluation clinique et biologique (fonction rénale et ionogramme) y est programmée.

Plus récemment, ces recommandations ESC ont été mises à jour suite à l'essai STRONG-HF, dont les résultats renforcent le besoin de surveillance étroite du patient  pendant les premières semaines suivant l'hospitalisation. Dans cette étude, les patients ont été revus 1, 2, 3 et 6 semaines après leur sortie.  Toutefois, l’application concrète d’un suivi aussi intensif des patients insuffisants cardiaques est difficilement réalisable sur le plan organisationnel pour de nombreux services de cardiologie en raison du manque de capacité de consultation.

Des réflexions de réorganisation doivent donc être envisagées pour pouvoir appliquer pratiquement cette surveillance plus intensive des malades lors de leur sortie d’hospitalisation.

Des options possibles pourraient être :

  • Blocage de plages spécifiques (à 1-2 semaines) pour ces patients nécessitant d’être revus dans de brefs délais .
  • Participation au suivi par les infirmières spécialisées en insuffisance cardiaque, sous la supervision d’un cardiologue d’insuffisance cardiaque.
  • Programmer ces consultations sur 1 à 4 semaines après la sortie de l'hôpital selon le profil clinique du patient (décrit ci-dessous).

Le médecin généraliste a également un rôle très important dans le suivi des patients insuffisants cardiaques, notamment lors des sorties d'hospitalisation. 

Ce parcours de soins propose donc un suivi combiné par le cardiologue (de préférence via la clinique d'insuffisance cardiaque) et par le médecin généraliste. En l’absence d’étude scientifique spécifique, le rythme et les modalités de suivi du patient (par le médecin spécialiste et le médecin traitant) reposent donc sur des recommandations d’un consensus d’experts.

Les profils des patients atteints d'insuffisance cardiaque (en particulier ceux atteints d'IC à fraction d’éjection réduite, HFrEF) sont divers et déterminés par de nombreux facteurs, notamment :

  • la stabilité de la pression artérielle.
  • la stabilité du rythme cardiaque et l’existence éventuelle d’une fibrillation auriculaire (FA) associée.
  • La présence d’une insuffisance rénale chronique (IRC) et/ou d'une hyperkaliémie.
  • le degré d’atteinte de la fraction d'éjection VG (FEVG).
  • la présence de signes d'insuffisance cardiaque terminale ou de manifestations congestives persistantes.

Globalement, le profil de risque des patients peut être classé en 3 groupes en fonction de plusieurs paramètres (voir tableau ci-dessous). Le risque clinique étant déterminé par le paramètre le plus anormal et/ou une combinaison de ces paramètres.

Avis :

  • L'HFpEF est classée à faible risque car elle nécessite principalement une adaptation de la titration des diurétiques. Cela peut donc être réalisé au cabinet du médecin traitant. Toutefois, l’apparition d’un syndrome cardio-rénal secondaire au traitement diurétique peut justifier un suivi plus rapproché par le cardiologue et/ou néphrologue au besoin.
  • Un diagnostic d'HFrEF de novo est classé comme haut risque: de nombreuses titrations et optimisations du traitement devant être effectuées. Par ailleurs, un suivi systématique doit être organisé pour juger de la nécessité de besoin d'un dispositif implantable après 3 à 6 mois de traitement médicamenteux optimal. Cela signifie que des contrôles plus fréquents chez le cardiologue sont nécessaires chez ce type de patients.

Suivi par le cardiologue

Le rapprochement du suivi par le cardiologue doit être adapté à la sévérité de l’insuffisance cardiaque et au degré de stabilisation du malade après titration médicamenteuse.

Premier contrôle chez le cardiologue après une hospitalisation pour insuffisance cardiaque:

  • Les patients à risque élevé de problèmes cliniques doivent idéalement être revus par le cardiologue après 1 semaine.
  • Les patients à risque intermédiaire, plus nombreux, doivent idéalement être revus par le cardiologue dans les 2 semaines après la sortie, après un contrôle intermédiaire à une semaine chez le médecin traitant avec prise de sang.
  • Les patients à faible risque peuvent être revus par le cardiologue à plus longue échéance (4 semaines) avec consultations intermédiaires avec le médecin généraliste toutes les 1 à 2 semaines.

Suivi ultérieur :

  • Adaptation du degré de surveillance selon la stabilisation clinique (symptômes) et le degré de titration médicamenteuse.
  • Un espacement du suivi est envisageable lorsque l’évolution clinique est favorable et le traitement optimisé au maximum.
  • La fréquence des consultations peut être principalement déterminée sur la base de la classe NYHA, de l'état cardiaque et des comorbidités.
    • NYHA I-II et stable : suivi tous les 6 à 12 mois.
    • NYHA III et comorbidités : suivi tous les 4 mois.
    • NYHA III-IV et comorbidités plus lourdes, état précaire : suivi tous les 1- 3 mois.

Le calendrier des consultations lors du suivi est déterminé par le cardiologue traitant. Plus l'état du patient est précaire, plus il est souhaitable de rapprocher les suivis afin de détecter à temps de nouveaux problèmes pour éviter les nouvelles hospitalisations.

Suivi avec le généraliste

  • Il peut être utile que le médecin généraliste rende visite au patient à domicile peu de temps après sa sortie (après 1 à 2 jours) pour évaluer l'évolution clinique, les paramètres et la prise correcte des médicaments, surtout s'il existe une suspicion de faible connaissance de la maladie et/ou de faible observance.
  • Chaque patient doit être vu par le médecin généraliste après 1 semaine, sauf si cela est prévu par le cardiologue.
  • Il est également souhaitable que le patient soit également vu par le médecin généraliste entre les consultations avec le cardiologue.
  • Un espacement du suivi par le médecin traitant peut également être envisagé selon la stabilisation du malade.
  • En suivi chronique, la fréquence des consultations peut être déterminée principalement sur la base de la classe NYHA, de l'état cardiaque et de la comorbidité.
    • NYHA I-II : suivi tous les 3 mois.
    • NYHA III : suivi tous les 1 à 2 mois.
    • NYHA III-IV : suivi toutes les 2 à 4 semaines.

  • Plus l'état du patient est précaire, plus il est souhaitable de rapprocher les suivis afin de détecter à temps de nouveaux problèmes pour éviter les nouvelles hospitalisations.

Lire : Rôle du médecin généraliste.

 

Rôle de l'infirmière en insuffisance cardiaque

Si possible, une infirmière spécialisée en insuffisance cardiaque peut appeler le patient à son domicile quelques jours après sa sortie pour évaluer sa situation au domicile. Lors d’un entretien téléphonique, l’infirmière spécialisée en insuffisance cardiaque se renseigne en particulier sur :

  • l'évolution des symptômes.
  • l'évolution du poids.
  • la stabilité du profil tensionnel et d’éventuels symptômes d'hypotension (orthostatisme).
  • l'évolution et la stabilité du rythme cardiaque.
  • la prise correcte du traitement.
  • le respect du régime pauvre en sel et de la restriction hydrique relative.
  • la vérification des prochains RDV. Prochain contrôle clinique (soit chez le médecin généraliste , soit chez le cardiologue) et dates de petite prise de sang.

L'infirmière spécialisée en insuffisance cardiaque adapte la fréquence des entretiens téléphoniques selon le besoin spécifique.

En cas de problèmes ou de questions, le patient peut contacter par téléphone l'infirmière en insuffisance cardiaque pour un contact, des conseils, un ajustement de la médication et/ou planifier une consultation rapprochée.

L'infirmière spécialisée en insuffisance cardiaque peut également suivre le patient par télésurveillance selon possibilités.

Populations spécifiques

  1. Patients insuffisants rénaux.

Les patients souffrant d'insuffisance cardiaque chronique et d'insuffisance rénale combinée peuvent bénéficier d'un suivi conjoint par un cardiologue et un néphrologue.

De préférence, les consultations avec le cardiologue et le néphrologue ne sont pas programmées le même jour, mais sont étalées dans le temps, de sorte que le patient soit réévalué cliniquement de façon régulière. Les patients plus instables sont vus alternativement par le cardiologue et le néphrologue pour surveiller d'éventuels signes de rétention d'eau, de tolérance au traitement avec contrôles biologiques rapprochés (fonction rénale et ionogramme).

Indications de suivi du patient insuffisant cardiaque par un néphrologue :

  • Clairance de la créatinine, DFG persistant <30 ml/min.
  • Clairance de la créatinine, DFG persistant < 60 ml/min avec protéinurie significative avec une augmentation modérée à sévère du rapport albumine-créatinine (ACR) sur un échantillon d'urine du matin > 30-300 mg/g, en particulier dans le diabète sucré et des antécédents de rétinopathie diabétique .
  • Déclin rapide et inexpliqué de la fonction rénale.
  • Sédiment urinaire pathologique.
  • IRC préterminale avec surveillance du besoin de dialyse.

 

  1. Patients à profil gériatrique.

Un suivi via l'hôpital gériatrique de jour, associé à une consultation avec le cardiologue, peut être utile chez les patients présentant un profil gériatrique et un ou plusieurs des éléments suivants :

  • Transport difficile vers les consultations lorsque des contrôles sont requis par plusieurs spécialités. La collecte de sang et les différentes consultations peuvent alors être combinées le même jour à l'hôpital de jour.
  • Problèmes de chute.
  • Problèmes cognitifs.
  • Problèmes sociaux liés à des situations familiales difficiles.

Chez les patients fragiles et à risque de chute, le traitement de l'insuffisance cardiaque peut parfois être moins agressif afin d’éviter des hypotensions favorisant davantage de chutes récurrentes.

Points d'attention lors du suivi après une hospitalisation pour décompensation cardiaque (la phase de transition)

La sortie de l'hôpital après une admission en raison d'une décompensation cardiaque ne signifie pas que le patient est considéré “stable”. On ne peut parler d' « insuffisance cardiaque stable » que si le patient présente des symptômes d'insuffisance cardiaque inchangés depuis plus d’un mois.

Les 4 premières semaines après une hospitalisation pour décompensation cardiaque est appelée phase de transition. Durant cette phase de transition de l'hôpital à la situation à domicile, il existe un risque accru de déstabilisation clinique avec risques de réadmission et de mortalité accrus. D’où la dénomination de “phase vulnérable” pour les 4 semaines suivant une sortie d'hospitalisation.

Parmis les causes possibles de réadmission ou de mortalité après une hospitalisation :

  • Récidive rapide de décompensation cardiaque due à un traitement sous-optimal à la sortie :
    • Principalement lors de congestion persistante lors de la sortie d’hôpital.
    • Traitement de l’insuffisance cardiaque sous-optimal (pas de traitement de l’insuffisance cardiaque ou dose trop faible) lors de la sortie.
  • Récidive rapide de décompensation cardiaque due à une éducation insuffisante (erreurs liées aux patients):
    • Mauvaise observance thérapeutique au retour à domicile : ne pas prendre ou mal prendre les médicaments prescrits, absence d’ordonnance, etc.
    • Erreurs de régime : consommation beaucoup plus élevée de sel/liquide à la maison par rapport à la consommation à l'hôpital.
    • Soutien et soins informels insuffisants.
  • Récidive rapide de décompensation cardiaque due à des facteurs non identifiés ou à une insuffisance cardiaque rapidement
  • Une mauvaise adaptation thérapeutique lors de la sortie d’hospitalisation: dose trop élevée de diurétiques ou d'autres traitements de l'insuffisance cardiaque avec évolution vers une déshydratation, une hypotension, une bradycardie, une insuffisance rénale, des troubles ioniques, etc.
  • Autres problèmes cardiaques surajoutés : syndrome coronarien aigu, arythmies,…
  • Autres problèmes non-cardiaques : infections, saignements, chutes (avec ou sans fractures), situation sociale ou familiale précaire, etc.

Suivi chronique des patients présentant une insuffisance cardiaque chronique stable (phase plateau) :

Un patient souffrant d’insuffisance cardiaque n’est considéré comme stable que si les symptômes, l’état clinique et le traitement restent stables pendant plus d’un mois.

Concrètement, cela signifie :

  • Un poids stable , euvolémique depuis plus d'1 mois.
  • Tension artérielle stable, sans orthostatisme.
  • Une fréquence cardiaque stable, de préférence autour de 60/min au repos (surtout chez les patients HFrEF).
  • Fonction rénale et ionogramme stables.
  • Médicaments de l'insuffisance cardiaque titrés au maximum toléré par le patient.

Remarque : Un patient apparemment asymptomatique peut néanmoins présenter un taux élevé de NT-proBNP et une progression subclinique de la maladie. L’évaluation par la seule classe fonctionnelle NYHA est donc parfois insuffisante. Dans la classe II de la NYHA, il faut toujours s'efforcer d'atteindre le maximum de médicaments tolérés d'insuffisance cardiaque et, si nécessaire, un dispositif implantable approprié (CRT/ICD) doit être placé. Par ailleurs, plusieurs études ont montré que les effets bénéfiques des traitements sont plus importants chez les patients présentant seulement des plaintes légères (classe NYHA II) que chez les patients présentant des plaintes plus prononcées et donc une insuffisance cardiaque plus avancée (classe NYHA III ou IV). Cela a été démontré entre autres avec l'ARNI, les inhibiteurs du SGLT2, l'ICD, ...

Lors du suivi des patients insuffisants cardiaques, de nouveaux problèmes doivent être détectés à temps et traités correctement.

Une attention particulière et un suivi plus intensif devraient être accordés aux patients atteints d'insuffisance cardiaque à haut risque. Ces patients présentent un risque plus élevé de décompensation, d’arythmie, d’hospitalisation et/ou de décès.

Paramètres d’identification des patients à risque plus élevé:

  • NYHA III - IV persistant ou signes de congestion
  • Une FEVG très fortement réduite < 25 %.
  • Nécessité de doses d'entretien élevées de diurétiques (> furosémide 80 mg ou bumétanide 2 mg par jour).
  • Une hospitalisation pour insuffisance cardiaque au cours des 6 à 12 derniers mois.
  • Épisodes répétés de décompensation cardiaque, avec ou sans hospitalisation.
  • Traitement optimal de l’insuffisance cardiaque limité.
  • Implantation récente d'un DCI/CRT ou arythmie maligne de type TV/FV avec intervention.
  • Comorbidités multiples, telles que :
    • Insuffisance rénale chronique (DFGe < 40 ml/min).
    • Un profil gériatrique avec fragilité et/ou risque de chute.
    • BPCO.
  • Un manque de motivation/connaissance de la maladie et/ou un risque élevé de non-observance du traitement.

Selon critères d’éligibilité, certains de ces patients auront éventuellement besoin d’être référés pour l’implantation d’un LVAD et/ou d’une transplantation cardiaque. Ceci est évalué par le cardiologue et, le cas échéant, précisé dans le rapport médical.

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